La confection d’une cloche est en fait très simple. La seule véritable difficulté résulte en l’obtention du son désiré à la fois franc et juste ; pour le reste, il ne s’agit « que » d’une coulée. La beauté du timbre, sa sonorité et son velouté dépendent de la qualité du métal, de l’alliage, du bronze, alors que la justesse de la note est une composante mathématique et géométrique entre les courbes, les diamètres et les épaisseurs.
Il existe trois types de profils. Pour une coulée de 2860 Kg, on obtient généralement un DO, ou un SI avec un profil léger, ou encore un RÉ au profil lourd, plus grave et donc d’une portée plus grande.
Mais assez d’histoire et venons en directement à la création telle qu’elle était pratiquée jusque dans les années soixante.
Le moule est composé de trois parties principales auxquelles s’y joint une quatrième : Le noyau, La fausse cloche, La chape, et enfin La tête.
Fabrication d'un Moule : Coupe (©
Jean Salmon
(1)
& Jean FARNIER)
Après avoir déterminé le type de cloche à livrer, sa note et son poids approximatif, plus quelques autres petits détails, le maître de l’ouvrage en établit le tracé.
Le saintier se sert pour cela de sa "BROCHETTE" ou échelle de campannaire qui permet, pour la note désirée, d’en déterminer l’épaisseur, d’où découlent toutes les autres dimensions. Il commence le tracé de celle-ci sur une planche dite d’échantillon pour en obtenir les contours.
1 Le noyau,
Puis suit la confection d’un moule, dont la première partie est le noyau. C’est l’intérieur de la cloche, donc la partie vide. Il est fait de briques tapissées d’un mortier d’argile mélangé, « d’une potée ». Le tout est séché par l’intérieur à l’aide d’un feu de bois.
2 La fausse cloche,
Vient ensuite le façonnage de la fausse cloche fait directement sur le noyau. Là encore, la potée est le principal composant, mais d'une autre finesse. Le noyau et la fausse cloche (l’intérieur et l’extérieur) sont calibrés grâce à un gabarit, ou planche à trousser, monté sur l’EFFORCE tournant autour de l’ARBRE afin d’obtenir un tracé d’une épaisseur parfaite. Une fois l’extérieur de cette fausse cloche terminée, les décors sont alors apposés à "cire perdue". Celle-ci est donc identique à la future œuvre.
Les décors en cire d’abeille sont coulés sur des matrices de buis sculptées en creux. Cela peut aussi bien être des dessins, des représentations religieuses que des chiffres et des lettres.
3 La chape,
Cet ensemble est ensuite recouvert d’une "CHEMISE" ou chape formée de couches de terre appliquées successivement, mais l’argile est d’une potée encore plus fine que les précédentes, elle est même tamisée. À ce nouveau mélange, on y ajoutait de la brique pilée ainsi que du poil de vache (Technique ou alchimie ?).
Cette chape appelée à recevoir une forte poussée lors de la coulée, est cintrée par des couches successives de CHANVRE; pour les grosses cloches, du fil de fer ou des cercles de bardages viennent renforcer le tout.
Après la réalisation de chacune de ces trois parties, le nouvel élément est séché par l’intérieur au feu de bois, donnant à chaque élément sa propre résistance et indépendance.
Cet ensemble terminé vient alors un moment très délicat : la séparation des 3 parties. La chemise puis la fausse cloche sont retirées. Il est indispensable que ces pièces soient suffisamment résistantes pour qu’elles puissent être séparées intactes, donc en un seul morceau. Des petites imperfections consécutives au démoulage peuvent, toutefois, être rectifiées. Puis la chemise est reposée avec un ajustement qui doit être parfait, laissant un vide à la place de la future cloche. De cette opération, très simple mais très minutieuse, dépend l’une des réussites de la fonte, de la résistance et de l’obtention de la note.
4 La tête (ou les anses),
Différents modèles d'anses, en cire... et en bronze
Un moule pour les anses est taillé dans du bois. Les anses ne sont pas créées que pour une question d’harmonie visuelle, elles servent surtout, à fixer l’ensemble de l’ouvrage sur le mouton. Grâce à elles, la mise en volée peut être effectuée.
Leur pose est encore un travail très délicat car ne tolérant aucune déviance, la perpendiculaire doit être parfaite.
On enterre ensuite le moule ; l’intérieur du noyau est rempli d’un nouveau mélange de terre et autres composants naturels. Le tout est alors recouvert de terre bien sèche et parfaitement tassée et damée.
Cloche "Farnier Frères" de 1889. Note: La Dièse; 322kg; Coupe de cloche